Un rapport
de l’ONG Amnesty International publié ce 21 septembre accuse plusieurs
entreprises européennes dont la française Idemia d’avoir vendu au gouvernement
chinois des technologies de reconnaissance faciale. Dans un contexte où la
Chine est pointée du doigt pour l’utilisation de ces technologies à des fins de
surveillance de masse, ce rapport entend soulever les problématiques liées à la
protection des droits humains.
Le
géant français Idemia accusé de vendre son système à la police de Shanghai
Le rapport d’Amnesty
International met en cause la société française Idemia, l’un des leaders mondiaux
sur le marché de la biométrie. Cette dernière est accusée d’avoir vendu au
bureau de police de Shanghai un outil de reconnaissance faciale sur
bande-vidéo. La vente aurait eu lieu en 2015 par Morpho, une ancienne filiale
de Safran qui a fusionné en 2017
avec Oberthur pour former Idemia.
Interrogée par Le
Monde, Idemia a affirmé que le système vendu était destiné à des
bandes-vidéo pré-enregistrées et ne pouvait donc pas « être utilisé pour
une surveillance en temps réel » et que par ailleurs ce « système
n’a jamais été déployé ».
Or, comme le souligne l’ONG il
est naïf de penser que la vente de cette technologie est sans répercussion sur
le développement des outils de surveillance du gouvernement chinois. En effet, ce
dernier, et notamment le bureau de la sécurité publique de Shanghai, a très
bien pu se familiariser avec cette technologie pour l’utiliser à des fins de
surveillance de masse.
L’ONG reconnait néanmoins que
Idemia a changé de position depuis puisqu’elle a appliqué une politique de non-vente
de systèmes d’identification à la Chine en 2017 après avoir identifié les
risques en matière de protection des droits humains.
C’est une chose de ne plus
vendre sa technologie à la Chine qui rappelons-le a déployé
plus de 200 millions de caméras de surveillance sur son territoire, à des fins
de contrôle de la population et permettant la répression de certaines communautés
– on pense par exemple aux Ouighours. Mais malgré tout, Idemia reconnait vendre
son système à d’autres gouvernements alors que ce matériel technologique est de
plus en plus pointé du doigt pour ses dérives de surveillance de masse, faisant
peser de graves risques sur les droits humains comme le souligne l’ONG.
Plusieurs
entreprises européennes également sous le feu des accusations
Toutes les entreprises ne
semblent pas se soucier de la violation des droits humains dû au déploiement d’outils
de reconnaissance faciale. C’est le cas de Morpho (devenu par la suite Safran
Identity & Security), qui a dédié une page
de son ancien site internet pour venter la vente de son système technologique à
des forces de police des villes de Tianjin, Canton et Wenzhou mais également
auprès de de provinces chinoises telles que Jiangxi.
D’autres sociétés européennes,
telles que Noldus Information Technology
se sont également défendues auprès d’Amnesty International en affirmant que ces
outils de reconnaissance des émotions et d'analyse du comportement ne peuvent
pas être utilisés en conditions réelles par les forces gouvernementales
chinoises mais seulement à des fins de recherche. Plus que nier les dérives
potentielles de ces outils technologiques, ces entreprises refusent avant tout
de s’acquitter de leur responsabilité de diligence raisonnable à l’égard des
droits humains.
Avec ce rapport, Amnesty
International espère faire évoluer favorablement les mesures de réglementation des
exportations de produits de surveillance des entreprises européennes vers des
pays tiers. Elle encourage également les entreprises à remplir leurs obligations
internationales en matière de protection des droits de l’Homme.
Bien que le rapport se
focalise sur l’utilisation des technologies de surveillance biométriques en
Chine, ce débat devrait être ouvert à l’ensemble des gouvernements utilisant ces
outils. Peu importe le régime politique, le déploiement de ces technologies a
le même objectif : la surveillance de masse et le contrôle de la
population.
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